La présidence de l’Union Africaine, avec à sa tête le président congolais Félix Tshisekedi invite l’Egypte, le Soudan et l’Ethiopie à une médiation, autour du conflit les opposant sur le barrage de la renaissance et le partage des eaux du Nil. Après plusieurs rendez-vous manqués, cette rencontre de la dernière chance sera déterminante.
Depuis plus d’une décennie, la guerre de l’eau est déclarée entre l’Egypte et le Soudan d’un côté, et l’Ethiopie de l’autre. En cause : la construction du barrage de la renaissance par l’Ethiopie, qui doit être achevée en 2022. Face à l’impasse, Khartoum avait demandé la médiation des Nations-Unies et de Washington. C’est au tour de l’Union Africaine de s’atteler à cette crise diplomatique.
Aux origines du conflit
Le mégaprojet initié par l’Ethiopie, appelé à devenir la plus grande installation hydroélectrique d’Afrique est au cœur des tensions. La construction du barrage de la renaissance remet en question les accords conditionnant le partage des eaux du Nil. L’accord de 1929 reconnaît à l’Egypte des droits naturels et historiques sur le fleuve et lui confère le droit de véto sur tout aménagement entrepris susceptible de réduire son débit. Le Traité de 1959, quant à lui, permet au Soudan en accord avec l’Egypte de construire des projets d’amélioration du flux du Nil, empêchant les pertes par évaporation. Ces accords octroient à l’Egypte le plus gros volume des eaux du Nil, avec une petite part pour le Soudan.
Les travaux de construction du barrage de la renaissance, ayant démarré en 2013, viennent discuter la position d’hydro-hégémon de l’Egypte. Cette dernière craint que le barrage réduise la quantité d’eau qui lui parviendra, sachant que le Nil est vitale pour l’Egypte. Le Soudan et l’Egypte ont exhorté l’Ethiopie à ne pas effectuer le remplissage du barrage avant la signature d’un accord.
Position égyptienne
Lors d’une conférence de presse à Ismaïlia, alors qu’il était interrogé sur la mise en eau du barrage de la renaissance, le président égyptien Abdel Fattah al-Sissi a déclaré « personne ne peut se permettre de prendre une goutte d’eau de l’Egypte, sinon la région connaîtra une instabilité inimaginable ». Une menace à peine déguisée, avant d’ajouter « personne ne doit s’imaginer qu’il est loin de la portée de l’Egypte ».
Au centre de ce différend se trouvent des plans de remplissage du barrage. L’Egypte craint que le projet ne permette à l’Ethiopie de contrôler le débit du fleuve. La vitesse de remplissage affectant le débit en aval. L’Ethiopie veut procéder en six ans alors que l’Egypte propose une période de dix ans. Le dialogue est bloqué entre les Etats riverains, et l’Egypte campe sur ses positions. Aucune « goutte d’eau » des eaux du Nil ne doit lui être dérobée. Le pays met au défi quiconque tente de franchir cette « ligne rouge », car il déclencherait un conflit militarisé. Les négociations avec la médiation de l’Union Africaine doivent aboutir sur un accord, sinon la région s’embrasera pour le précieux or bleu.